Le sarrasin : une plante de la circulation lymphatique, du système cardio-vasculaire contre les oedèmes et l’érythème, anti-inflammatoire, antiallergique
Faussement appelé « blé noir », le Sarrasin est une plante de la même famille que l'oseille et la rhubarbe.
Originaire d'Asie centrale et de Sibérie, le sarrasin a été vraisemblablement introduit en Europe, par les Turcs et les Mongols, au Moyen-âge. Il fut d'abord cultivé aux environs de la Mer Noire, d'où les échanges commerciaux l'ont transmis à toute l'Europe centrale puis à l'Europe occidentale. Cependant, des restes de pollen semblent indiquer que le sarrasin fut cultivé en Armorique à l'âge de Fer. En France, il fut popularisé en Bretagne par la duchesse Anne.
Le sarrasin (Fagopyrum esculentum) est une plante annuelle herbacée, de la famille des Polygonaceae. Haute d'environ 60cm, elle possède une tige creuse, ramifiée, portant des feuilles triangulaires, dont le pétiole s'insère sur la tige par une "gaine" ou ochréa. Ses petites fleurs, bisexuées, jaunes ou roses, au nectar abondant pendant une longue période, sont très mellifères. Les graines, des akènes, sont de couleur noire, elles donnent une farine alimentaire. Le sarrasin pousse dans les sols siliceux et pauvres mais s'adapte à beaucoup de sols légers. Il aime les climats humides et tempérés. C'est une plante à croissance rapide qui peut être cultivé en rotation. Semé en avril ou juin, il peut être récolté en septembre.
Une plante alimentaire.
Autrefois, cette plante, était surtout utilisée pour l'alimentation du bétail et des chevaux. Les graines servaient de nourriture aux volailles. Puis, sous la nécessité engendrée par les périodes de disette, nombreuses à certaines époques, les paysans ont appris à moudre les graines et ainsi, réduite en farine à être mélangée à la farine de blé pour la confection du pain. Dans certaines régions, notamment, en Bretagne on en faisait également des "galettes" destinées à remplacer le pain. Aujourd'hui, les galettes de « blé noir » bretonnes, à côté des crêpes de froment et du « far » breton, continuent de connaître un certain succès gastronomique ayant tendance à gagner l'ensemble du territoire voire même au-delà des frontières.
En Europe orientale, les graines entières bouillies, constituent un gruau connu sous le nom de "Kasha". La farine de sarrasin est utilisée pour préparer les « Blinis » (petites crêpes russes) Au Japon, on utilise les graines dans la confection des nouilles « Soba ».
Pour certains auteurs, les graines, riches en éléments nutritifs (protéines, vitamines et éléments minéraux), produisent une farine dépourvue de gluten et contenant beaucoup d’acides aminés essentiels. Sa consommation produit un certain équilibre psychique portant à l'indulgence et à l'optimisme tout en favorisant le rendement intellectuel. Parfaitement digérées, elles sont conseillées chez les dyspeptiques, aux femmes enceintes et à l'adolescent, dans les cas de surmenage et pour favoriser la croissance.
Ses graines brassées produisent de la bière et des alcools. Elles sont aussi employées pour l'alimentation des animaux domestiques tels que porcs, volailles et faisans.
Le Sarrasin est très mellifère, il a un avantage considérable ; étant annuel, on peut le faire fleurir en masse, en six semaines, au moment où les autres fleurs sont moins abondantes. Le miel de Sarrasin est épais, rougeâtre, au goût malté, plus estimé en confiserie que pour la table.
Une plante médicinale
Ses feuilles, riches en flavonoïdes, ont des propriétés médicinales. Le Sarrasin est une source d’extraction de rutoside ou rutine. Les feuilles en contiennent de 2 à 3 %, voire 5 à 8 % dans les variétés améliorées. La rutine exerce une action vasoconstrictrice directe sur le système veineux capillaire. C'est une action vitaminique P, P pour facteur ou vitamine de perméabilité.
Une augmentation de la perméabilité capillaire se traduit par une tendance aux oedèmes, avec une augmentation du passage extravasculaire des protéines, entraînant une augmentation et une surcharge de la circulation lymphatique. Dans ce processus, la hyaluronidase joue un rôle important, elle induit un effet de relâchement du réseau de fibres protéiques dans le tissu conjonctif. Effet bénéfique s'il n'y a pas d'obstacles à l'écoulement veineux. En cas d'obstacles, elle favorise l'oedème. En inhibant la hyaluronidase, la rutine rend plus dense le réseau de fibres protéiques et exerce ainsi un effet anti-oedèmateux et / ou anti-exsudatif. Le Sarrasin contient des Procyanidines aux propriétés anti-oxydantes.
En conséquence, le Sarrasin diminue la perméabilité ainsi que la fragilité capillaire. C'est une action vitaminique P, très appréciée dans le traitement des pathologies du système cardio-vasculaire.
Par plusieurs mécanismes, la rutine exerce aussi un effet anti-inflammatoire. D'une part, c'est un inhibiteur non compétitif des prostaglandines E2 (PGE2). Ces substances hormonales provoquent et sont des médiateurs de l'inflammation. D'autre part, la rutine inhibe la décharge endogène cellulaire d'histamine. Or, dans une inflammation, la sécrétion d'histamine est accrue, ce qui provoque la dilatation des vaisseaux capillaires, cet effet est accompagné de rougeur, d'érythème local et d'un oedème. Ainsi, en inhibant la décharge d'histamine, la rutine s'oppose à l'effet inflammatoire. Par ailleurs, la rutine inhibe, aussi, la décharge endogène de sérotonine (5-hydroxytétramine, 5-HT), qui à haute concentration participe à l'effet algique.
Les graines de Sarrasins exercent une action anti-allergique avec une inhibition de la sécrétion d’histamine et de cytokine et inhibent la production de l’enzyme de conversion.
Alain TESSIER
Ethnobotaniste